Lettre ouverte au ministre Brice Hortefeux

Pour que cette ouverte ait le poids qu'elle mérite, que notre lutte soit reconnue au niveau national, venez la soutenir massivement dans la rue !
Rendez-vous à 13 heures, départ 13 heures trente au Métro Saint Jacques - Arrivée au ministère des affaires sociales, du travail, de la solidarité et de la famille. Réception d'une délégation FNAS FO et des Collectifs IDF.




Paris, le 22 juin 2009

Monsieur le Ministre,

Depuis décembre 2008, trois syndicats d’employeurs (FEGAPEI, SNASEA,SOP) veulent imposer une révision de la convention collective de mars 1966. Cette révision, sous couvert de modernisation et de gestion rationnelle, représente une menace de destruction pure et simple de notre domaine d’action et de nos pratiques professionnelles.

La visée essentielle de ce projet est d'obtenir, quelles qu'en soient les conséquences pour les usagers et les professionnels, un abaissement radicalde la masse salariale (celle-ci représente 80% de nos frais de fonctionnement).

Deux leviers pour y parvenir :

Premièrement, le ravalement de la convention au droit du travail le plus strict, par la suppression des congés trimestriels, le salaire au mérite, la non reprise de l’ancienneté, l’instauration de trois jours de carence en cas de maladie, la dévalorisation du calcul de progression de carrière…

Deuxièmement, la déqualification des personnels soignants et éducatifs.

La France s’est toujours enorgueillie du niveau d’excellence et de la formation de ses professionnels de la santé comme du social. Ces professionnels sont validés nationalement par des diplômes d’état, c’est le garant pour tout citoyen de son droit à l’égalité dans l’accès au soin et l’accompagnement social.

Or, sous le prétexte de devoir intégrer de pseudo nouveaux métiers, cette révision veut légaliser des « emplois » déqualifiés par l’instauration de filières que nous refusons :

des « techniciens de.. », « agents de… », « auxiliaires de… », « chargés de… » etc...

Un seul exemple : l’intégration du « métier » « technicien d’encadrement » permettrait l’embauche d’un étudiant en psychologie après quatre années universitaires. C’est la législation sur l’emploi du titre de psychologue (MASTER2 professionnel, bac +5) qui serait ici contournée. C’est le discount à l’embauche qui serait instauré, et à terme la disparition du diplôme de psychologue qui serait programmée.

Cette déqualification professionnelle vise de la même manière les éducateurs spécialisés, les psychomotriciens et orthophonistes, les assistants sociaux…

Sachez, Monsieur le Ministre, que depuis janvier 2009, un mouvement, sans précédent dans notre milieu associatif, prend de l’ampleur.

Des collectifs de salariés se structurent et s’organisent entre eux. Des directeurs d’institutions, des médecins-directeurs eux-mêmes y sont actifs. Ainsi, du personnel de service jusqu’aux équipes de direction, le rejet de ce projet inadapté est total.

C’est aujourd’hui notre sixième journée de grève et de manifestation. Nous sommes progressivement rejoint par des collectifs étudiants (éducateurs, psychologues, psychomotriciens..) qui prennent conscience de la menace mortelle qui pèse sur leurs diplômes. Mais aussi par des salariés de la convention 1951 qui se savent en danger.

Il est absolument nécessaire de rappeler ici qui sont ces institutions qui tirent le signal d’alarme.

Il s’agit d’associations loi 1901, le plus souvent issues d’initiatives citoyennes : parents, professionnels, religieux parfois.

Elles assument toutes, en lieu et place de l’Etat ou des collectivités locales, des missions reconnues d’utilité publique : hôpitaux de jour, ESAT, IME, CMPP, SESSAD, Foyer d’hébergement, MAS…

Par leur existence, elles permettent des économies extraordinaires, malheureusement jamais chiffrées. De fait, ces missions, si elles étaient assumées par l’Etat ou les collectivités, représenteraient autant de fonctionnaires en plus, de coûts de structure en plus !

Peut-on dès lors accepter, qu’après ne pas avoir assumé ses missions d’utilité publique, l’Etat souhaiterait non seulement s’en désengager en tant que financeur ? Mais validerait également un projet patronal qui, associé entre autre aux CPOM, trace la voie vers une logique de marchandisation du social comme du soin psychique ?

Enfin, Monsieur le Ministre, nous vous demandons de répondre et de vous engager. Non pas seulement devant les collectifs de professionnels et les syndicats, mais surtout face à ceux que nous accueillons et amenons à la place à laquelle ils ont droit dans la société : enfants autistes, travailleurs handicapés, personnes atteintes de polyhandicaps, adolescents schizophrènes…, et aux familles inquiètes.

Les plus fragiles d’entre nous ont-ils le droit à des équipes de personnels diplômés, ayant des moyens décents d’exercice de leur métier ?

Au prétexte de leur différence, et de la faiblesse de leur voix, sont-ils voués à un accueil au rabais indigne de notre pays ?

La convention collective 1966 attaquée c’est

250 000 professionnels déqualifiés,

des millions de personnes fragiles maltraitées !

A l’heure où vous nous recevez, d’autres manifestants, sur le lieu de la commission paritaire, expriment leur refus de la signature d’un « accord d’étape » qui enclencherait, non pas l’amélioration de la convention, mais sa liquidation.

A l’intérieur de cette commission, les négociateurs des syndicats représentatifs des salariés ont en face d’eux non plus des dirigeants d’association, mais des juristes et des gestionnaires ignorants de nos pratiques et de la souffrance sociale et psychique qu’elles traitent !

Pour toutes ces raisons, Monsieur le Ministre, nous vous sollicitons solennellement pour arbitrer ces négociations en impasse.

Nous en appelons à votre responsabilité pour affirmer votre choix d’une convention collective 1966 :

-Au service des usagers.

-Garantissant les conditions de travail décentes qui y sont inscrites.

-Garantissant les diplômes comme seuls critères de compétence et d’embauche, à l’exclusion de toute dérive.

Vous remerciant par avance de ce que vous entreprendrez pour cette cause d’intérêt national, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos salutations respectueuses.

Pour les Collectifs Ile de France de défense et d’amélioration

de la Convention Collective 1966

Jean-Michel CARBUNAR (porte-parole de la Coordination Nationale)

Pascal OLLIVIER (collectif « Sauvons le soin psychique ! »)

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